J'ai toujours aimé les très vieilles dames, quand elles sont gaies.
Madame Hurstel était l'une d'elles :
- Petit garçon, viens près de moi.
- Je ne suis pas un petit garçon. Je suis votre infirmière.
- Mon infirmière !
- Mais oui. C'est moi qui vous ai fait votre piqûre au moment du petit déjeuner.
- Oui, oui. Mais j'aimerais que tu me dises... Où suis-je ici ?
- Vous êtes chez vous, madame, dans votre appartement.
- Dans mon appartement ? Et ma fille, où est-elle ?
- Vous la verrez ce soir. Votre fille habite ici, avec vous.
- Ma fille habite ici aussi ! ? ! Quelle coïn-ci-dence... !  Et dis-moi, petit. Est-ce que tu la vois, ma fille ?
- Je la vois parfois les dimanches, quand elle ne travaille pas.
- Alors, quand tu la verras, est-ce que tu peux lui demander comment elle s'appelle ?
- Mais pourquoi ?
- Parce que quand tu le sauras, il faudra que tu me le dises. Tu veux bien ?
J'avais promis, bien entendu. Mais comment savoir aujourd'hui si j'ai ma promesse ?
Avant de repartir - cela, je m'en souviens bien - j'avais sorti deux carrés de chocolat de mon sac. Madame Hurstel rayonnait, elle adorait le chocolat, mais il me semble me rappeler qu'elle n'avait pas le droit d'en manger. Quant au nom de sa fille, je l'ai oublié.