Si je vous racontais un souvenir d'oral au Bac ?

Il était grand, rouquin, presque allongé sur sa chaise, les mains croisées derrière la nuque, observant chaque candidat fraîchement arrivé dans la toile :
- Algèbre ou trigo ? proposait l'araignée, l'oeil mi-clos.
- Algèbre ! s'écriait le candidat, plongeant dans la toile.
- Mouvement uniforme, annonçait alors le pervers.
Ou bien, savourant à l'avance son plaisir :
- Mouvement uniformément varié.
Tête déconfite de l'élève englué. L'un après l'autre, les candidats se faisaient  avoir.

Arrive mon tour.
Notre rouquin pervers me tend le même piège. Mais moi :
- Eh, monsieur ! Ca dépend de quelle algèbre et de quelle trigo vous parlez !
Il rigole, enchanté. Enfin un peu d'aventure.
Après plusieurs propositions tordues qu'il s'amuse à me voir refuser négligemment, redevenu un professeur normal, il se décide à m'imposer le calcul d'une dérivée. Une des seules questions de cours que je savais par coeur.
Du charabia pour moi, de toute façon. Je me rappelle encore le début :
"La dérivée d'une fonction pour une valeur X1 de la variable est la limite, lorsqu'elle existe, de...", de je ne sais plus quoi.
Je croyais à chaque instant devoir entendre :
- Mademoiselle, taisez-vous, vous êtes folle.
Mais l'homme disait : - Bien, bien...
Et je continuais - comme un perroquet, mais en plus inquiet - (tranquille en apparence, attention).

L'algèbre et la trigo, pour moi : une histoire de fous.