dimanche, novembre 28 2010, 16:59
Le poème "Just", en attendant
Par Lika Spitzer - Journal - Lien permanent
Sam et Nat étaient en retard. Le champagne était au frais; nous, au chaud; les chats en alerte - personne n'aime attendre. Alors j'ai dit à Philippe : "Tu vas voir, dès qu'on cesse d'attendre pour se mettre à un travail, les invités arrivent."
Je vais donc chercher mon recueil Oeuvre poétique Collected Poems, de Keith Barnes, (éditions d'écarts) traduits par Jacqueline Starer et je choisis de lire tout haut pour Philippe :
Juste
Laisse ta tête posée sur ma poitrine
Non que je sois brave
ou puisse veiller sur toi
mais laisse ta tête posé sur moi
Il y a beaucoup de choses
que je ne comprends pas
juste le bien-être de ta tête
juste là sur ma poitrine
juste contre mon sein
tes cheveux la chaleur de ton souffle
juste ici et maintenant ici maintenant
en ces moments proches du sommeil
comme le silence de ton regard
Laisse ta tête posée sur ma poitrine
Just
Keep your head down on my chest
Not I am brave
that I will watch
but keep your head down
I don't understand many things
just the comfort of your head
just there on my chest
just against my nipple
your hair your warm breath
just here an now here now
in these moments into sleep
like the deafness of your gaze
Keep your head down on my chest
Et vous savez quoi ? Sam et Nat sonnaient à la porte comme je lisais "ou puisse veiller sur toi" !
Tandis que Philippe nous versait à boire, j'ai repris ma lecture, et Nat, derrière sa coupe de champagne avait les yeux aussi embués que son verre. (Ce qu'elle a dit, je le raconterai peut-être un autre jour.)
6 commentaires
Décidément qu'est-ce que j'aime ce Keith Barnes! Merci encore de me l'avoir fait découvrir, quand je viendrais te voir, je jetterai un coup d'oeil sur ce recueil.
J'aime cette écriture qui dit tout avec simplicité, sans fioritures! Que c'est agréable.
C'est ce que j'aime dans ton écriture aussi by the way, cette importance accordée au choix des mots justes, qui permet de ne pas s'éterniser et s'enliser dans des phrases à la Marcel Proust (quel culot,cette malina!)
Bisou!
Grâce à toi, Malinoutchka, j'ai remis le nez (et le coeur) dans "K.B. / Keith Barnes". Et je vais l'emporter dans mon lit. J'ai dû le lire au moins trois fois.
Dans ce livre-là, publié également aux "éditions d'écarts", Jacqueline Starer parle de sa vie auprès de Keith Barnes, de leur amour, de leur travail. Un livre magnifique. Tu vas l'aimer aussi.
Je suis tellement heureuse que tu sois sensible à la poésie de Keith Barnes ! Je te procurerai ces deux livres. Ce sera ton Nöel.
Quant à Proust, ses phrases sont comme les vagues qui naissent du passage d'un bateau, et elles vont aller inexorablement, grossies du passage d'autres bateaux, jusqu'au rivage... J'ai pensé cela un jour. J'aime Proust, tu sais, mais j'aime bien aussi les écrivains aux phrases courtes, et je préfère, en général, les nouvelles aux romans, ce qui n'est pas très français.
Il se fait tard. Je t'embrasse très fort.
C'est sûr que Keith Barnes, c'est moins amphigourique que Emily Dickinson.
Avec lui, si on pleure, on sait au moins pourquoi on pleure.
Pas de commentaire, en fait. Ce fil d'amour entre vous m'émeut dans son évidence. Non, décidément, No comment!
Tellement simple, tellement émouvant, ici maintenant.
@ Outzi Ouane : Emily Dickinson n'a RIEN d'amphigourique. Elle écrit avec une simplicité coupante ce qu'elle vit, ressent, imagine, espère amèrement. Elle est tout le contraire, précisément des "poètes" amphigouriques (ils sont beaucoup).
Keith Barnes, il est vrai, est plus accessible.
@ Charlotte : J'AIME ce que tu dis. Merci.
@euphrosine : Touchée que tu aies été émue par ce poème de K.B.Tu es vraiment une sorcière, parce que je vais beaucoup mieux. Presque sans antalgiques. Et je sais que tu y es pour quelque chose. Tu es une réparatrice.