Un peu à la bourre, je marche d'un pas alerte sous la pluie vers le métro Belleville. Soudain un bruit de sirène à vous percer le tympan.
Je regarde la voiture garée à ma gauche le long du trottoir. Pas de lumière clignotante. Je poursuis ma route et toujours cette sirène. Serait-ce la voiture suivante ? Ou encore celle qui suit ? Aucune ne clignote. Je continue de marcher dans ce bruit horrible... 
Puis tout à coup je me dis : "Et si c'était mon nouveau portable ?" Je plonge la main au fond de mon sac : c'était LUI !  Heureusement, la rue était déserte. J'appuie sur dix boutons (j'ai compté), le bruit ne s'arrêtait pas. La honte. A tout hasard j'appuie sur un carré à peine visible au dos du téléphone et je vois s'inscrire en rouge : SOS ! j'appuie encore, et tout s'éteint : le bruit - et le signal rouge. Plus tard la même chose se reproduit quand je traverse l'avenue Simon Bolivar, alors que je n'avais pas touché à mon portable de la journée. Fureur. Je viens de comprendre...
Philippe, enchanté, m'a acheté le portable LE PLUS SIMPLE, avec de gros chiffres. (Je ne m'étais jamais plainte de la taille des chiffres...) "Exactement ce qu'il te faut", a-t-il dit, comme tu n'envoies pas de SMS ni de photos..."  Mon nouveau téléphone était donc bien un portable de vieillard valétudinaire, égrotant et cacochyme (j'adore ces mots). Oui : car il pouvait être relié à un organisme comme le Samu, les pompiers, ou la personne à prévenir en cas de danger, on voit le genre.
"Bon, ai-je dit, si tu ne désactives pas ce truc, à la prochaine sonnerie je le fous à la poubelle."
De temps en temps, ça lui prend, à Phil. Déjà, il y a bien trente ans, il s'était mis à me beurrer mes tartines, au petit déjeuner. Moi, furieuse : "Tu ne peux pas attendre que je sois paralysée ?"
Je ne suis pas folle : je sais que quand j'aurai VRAIMENT besoin de ce genre de service, il me le rendra... moins volontiers. C'est capricieux, la bienveillance chez les hommes, j'ai remarqué.