lundi, octobre 31 2011, 15:29
Edvard Munch à Beaubourg, hum... ?
Par Lika Spitzer - Journal - Lien permanent
Quelle déception, cette exposition d'Edvard Munch, hier !
J'y allais, espérant y trouver mon tableau préféré, Portrait de ma sœur Inger * (1884), où cette jeune fille, en robe noire semblait avoir été peinte avec des baisers. Ce tableau je ne l'ai pas trouvé ! Et on ne doit PAS le confondre avec le portrait, peint en 1892, plus froid, où Inger a les mains croisées devant elle et porte une robe presque noire aussi, mais tachetée de motifs roses.
Beaucoup de visiteurs cherchaient Le cri. Point de "Cri" - il existe pourtant une cinquantaine de variantes de ce tableau. Comment comprendre ?
Ne figurait pas non plus à Beaubourg La danse de la vie, où Munch exprime son dédain envers des danseurs sans délicatesse, certains même grossiers, grotesques. Trois femmes, au contraire, semblent des personnes sensibles. La première, douce et légère au fond du tableau, a peut-être un cavalier, mais un danseur sinistre au premier plan ne nous permet pas de le savoir. Les deux autres femmes, un peu plus mûres, encadrent debout les deux côtés du tableau, sans regarder les danseurs. Pensive, un brin mélancolique, celle qui arrive, seule, de la gauche sur l'herbe vert sombre, vêtue de blanc et ocre, s'essaie à sourire, tandis qu'immobile en sa robe noire, raidie en sa douleur, la femme au mince visage désespéré, seule elle aussi, que Munch a placé au premier plan à droite, semble se demander : "Faut-il vraiment continuer à vivre parmi ces gens-là..." Un tableau que j'aime beaucoup, vous l'avez compris.
Absents aussi, les tableaux La femme au trois stades de son existence, Le clair de lune, La Tempête, on ne va pas tout énumérer.
Un miracle, donc, qu'ait figuré dans cette expo L'Enfant malade, en deux versions, s'il vous plaît, Le Printemps, et surtout La puberté : cette jeune fille nue au regard intense, assise modestement sur le bord d'un lit, les bras allongés devant elle cachant son pubis. Les mains et les pieds joints sont peints avec douceur et respect. J'ai pensé alors à ce qu'il peut y avoir de mépris dans la façon dont Munch peint les visages vides des bourgeois, déterminés plutôt par leurs chapeaux, dans Soirée sur l'avenue Karl-Johann. Manquent aussi La Mort de la mère, aux couleurs si légères, l'Autoportrait à la cigarette .
Par contre, m'ont fascinée La Vigne vierge, un tableau qui barbouille de sang ou de flamme toute la façade d'une maison (et d'ailleurs Munch a peint aussi une maison incendiée), Mélancolie, où domine un orange torride dans toute la chambre et jusque sur le visage et les mains de la femme assise qu'on sent demeurer en sa nuit intérieure. Même fascination pour Le soleil, qui écrase le paysage tout entier sous les lourds barreaux jaunes, rouges, verts et même bleus, d'une prison géante, où j'ai vu... l'autorité intraitable du père. Un tableau un peu pâli dans les reproductions. Mais Munch a peut-être peint plusieurs de ces soleils, qui sait ?
* Portrait de ma soeur Inger figure dans le Munch publié par TASCHEN que vous pouvez acheter sans aller voir l'exposition, un grand livre vendu 9,9 euros - quand chaque place coûte davantage ! Si vous n'avez pas pu réserver un coupe-file, franchement, cela ne vaut pas le coup de faire la queue... La plupart des reproductions sont très bien. Et si la paye est tombée, achetez encore, si vous ne l'avez pas, le DVD intitulé Edvard MUNCH, un film de Peter Watkins. Je l'avais vu en ma jeunesse, revu plus tard. Vous ne le regretterez pas !
8 commentaires
et bien, ça me fait un regret de moins ;-)
par contre, si j'étais à Paris, j'irais voir Sempé à l'hôtel de ville!
Excellente idée ! A peine ton commentaire lu, je dis à Phil - qui adore aussi Sempé - "Et si on allait voir Sempé à l'Hôtel de ville ? C'est direct en métro pour nous". Il a tout de suite dit d'accord. Merci, Adrienne ! Avec la dentelle à trous qui me sert de mémoire, j'allais occulter le truc !
Adrienne, j'aurais dû y penser : un fonctionnaire, ça ne travaille pas le 1er novembre !
Bien sûr que si, les fonctionnaires travaillent! As-tu à ce point oublié le métier que tu pratiquas??? Mazette, chère Lika, je commence à me faire un sérieux souci pour ta mémoire qui aurait tendance à réécrire l'histoire.. Les fonctionnaires travaillent tant qu'à la retraite , ils continuent eu égard à la faiblesse de leurs revenus... Les musées, en revanche que tu visites pourtant assidûment, sont fermés le MARDI... si ma mémoire est bonne.
Pour ce qui est de Münch, je n'ai rien oublié de ce que j'ai vu de lui, et c'est avec plaisir que je découvrirais d'autres choses inconnues... Si j'étais à Paris!
Mais je ne suis plus fonctionnaire et je ne vis pas à Paris, me contentant de rêver aux choses que je ne ferai pas en regardant passer les nuages...
Je t'embrasse.
Toujours autant d'humour, Charlotte... Et puis, toujours moralisatrice, avec ça : aïe, aie, aïe, ma doué !
Adrienne était prof, figure-toi, et c'était à elle que s'adressait ma plaisanterie.
@ Charlotte : Je connais trois jeunes "professeurs des écoles" comme on dit, dont ta fille, ma filleule adoptive, qui adorent leur travail, bossent comme des fous, et que je respecte comme personne. L'un d'eux a refusé d'arrêter de travailler malgré son cancer au cerveau. Il vient de fêter ses vingt-cinq ans. Et j'ai plusieurs amies profs dans des banlieues. L'une a eu un jour un œil au beurre noir, l'autre a vu sa voiture taguée d'injures à cause d'une note qui déplaisait à l'élève. Soyons donc lourds, puisque tu ne comprends pas la légèreté.
Bravo Lika pour le compte rendu de ta visite au Musée. Tu parles en artiste, pour moi qui ne peux plus y aller, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt tout ce que tu dis. C'est vivant, riche et je peux constater que tu connais bien ce peintre. Merci
En espérant te voir bientôt, je t'embrasse
Thérèse
Petite Thérèse, merci d'être passée. Moi aussi j'espère te revoir bientôt, on va s'arranger. (Les fonctionnaires retraitées, il n'y a pas plus occupé, pas vrai ?) Je te téléphone demain. Je t'embrasse.