Voilà : le beau temps a laissé la place à la pluie. Il devient plus facile de faire rentrer les chats le soir. Car à la nuit tombée, elles s'enfoncent dans les fourrés, dans les champs de maïs, et je crains toujours une rencontre avec le belettes ou les renards. Alors le Trégor entier doit retentir de nos cris tour à tour suppliants, désespérés, furieux : "NOOOOOraaaaa ! PUUUUUtziiiii !" 
     Après l'anniversaire des soixante ans de mariage de mes beaux-parents, celui de mon beau-frère, le retrouvailles avec nos voisins, le seules choses personnelles que j'aie réussi à conserver sont un peu de lecture, quelques pages sur mon cahier et surtout le temps réservé au piano, de minuit à deux heures du matin, dans le dortoir désert... (non, pas désert, puisque Nora et Putzi viennent me tenir compagnie - patientes). 
     Hier soir, avant de partir dormir dans la petite maison à côté de la nôtre, ma belle-soeur m'a dit : - Ah oui, tu vas faire ton piano..., c'est ton dérivatif... J'ai répondu : - Mais non, c'est le contraire, c'est mon "concentratif". Elle m'a regardé avec attention. Que faire, je sais que tout ce que l'on fait sans que cela rapporte de l'argent est considéré par beaucoup comme un divertissement, on s'y habitue.