lundi, décembre 6 2010, 23:58
Arrachée du réel
Par Lika Spitzer - Journal - Lien permanent
Quand ai-je écrit ça au crayon sur un de mes carnets indiens cartonnés ? L'année dernière ? Je ne sais pas.
C'est étrange: j'ai eu tant de mal avec le réel, refusant d'en percevoir tant de plans, qu'à la fin c'était comme s'il ne me restait plus qu'un ou deux doigts de pied à poser sur le sol, et par temps de brouillard encore. Tant de mal avec le réel, et voilà que cette enfant née de moi, si réelle, qui m'avait donné tant de leçons de réalité, m'avait si souvent émerveillée par son pragmatisme affectueux, son imagination à la fois râpeuse et éclaboussée de soleil, voilà que cette enfant devenue femme (et si triste, si triste) est partie en fumée, voilà qu'elle n'est plus - moins réelle maintenant que le vent qui me passe sur le visage. Plus rien.
Plus rien ?
Et moi, petit à petit, par elle débarrassée de mes brumes, par elle réconciliée avec la vie, je me dois d'admettre qu'elle, si vivante, a disparu dans le non-réel. Jouer à colin-maillard ne sert à rien, mes mains se tendent en vain; et quand le masque s'enlève, ne reste que la disparition stupéfiante de Sarah, une scène où elle ne sera plus jamais l'actrice, la joueuse, la soucieuse, la vivante, et maintenant je ne sais plus rien dire de ce qui est advenu d'elle depuis qu'elle s'est arrachée du réel une nuit ou un matin.
13 commentaires
Ouhla! Il va falloir que je revienne lire ça à tête reposée...
Ma Lika chérie. pour te répondre à chaud: il me semble que tout ce que tu dis, tout ce que tu écris depuis sa disparition, TOUT parle d'elle. Pour nous autres qui te lisons et qui t'aimons, elle n'a JAMAIS disparu, elle est vivante, présente et même, parfois je lui demande ce qu'il convient de te dire pour tenter de te réconforter, parce que je sais bien qu'elle seule saurait... Mais parfois, j'en suis sûre, elle me donne un petit coup de pouce. Je t'aime, ma Lika. A bientôt.
@ eyphrosine : Je comprends, petite sorcière. C'est un peu dur...
@ Charlotte : Si tu veux faire quelque chose pour moi, eh bien, joue du piano ! J'aimerais avoir ton talent, ta technique ... et tes MAINS ! I love you too...
Moi, je pense avec toi à une petite Gaëlle, étoile filante de douze ans partie dans le non réel en 1986, mes 20 ans dont on dit qu'ils doivent être les plus beaux. J'aime, que dis-je, je plus que ça ton point d'interrogation, ma Lika, je le partage, je le porte comme dans le poème de Lamartine chanté par Brassens où il est question d'hirondelles. Je te serre dans mes bras de soeur humaine.
Sorcière euphrosine, tu as encore deviné... Cela va faire quinze ans à Noël, et j'avais besoin justement qu'une sœur humaine me serre dans ses bras - oui. J'ai tous les CD de Brassens, mais je ne vois pas de quelle chanson tu veux parler. Sais-tu le titre ? Tu me le dis, et je cours l'écouter. Moi aussi je t'embrasse, fort !
Que c'est beau et comme c'est triste ! J'en ai les yeux brillants.
Je te fais un big hug !
Chriss sur son îlet
Merci Chriss... J'ai quand même peur qu'abordant cette période de Noël où tout brille dans les rues et les maisons, mon écriture ne sache pas être au diapason... Avec les amis, ça va - bien ! - surtout avec des canons... Mais devant ma feuille... Moi aussi I give you a BIG HUG ! Merry Christmas ! (ton nom s'y prête, s'pas ?)
C'est "pensée des morts", dont parle tourterelle dans les commentaires de ton article suivant. Solidarité d'oiseau, que veux tu...
Je me demandais si "tourterelle" , ce n'étaient pas quelques petites plumes que tu avais trouvées pour te réchauffer le coeur ?
Oui, j'ai écouté cette chanson, et encore maintenant... Merci euphrosine !
J'ai lu et relu ce petit texte... Sans savoir quels mots prononcer. Alors, je dis simplement que je suis passée et que ma pensée envers -vous- perdure...
@ Pivoine: Je suis venue vous rendre visite, aussi, sans rien dire...
Y a pas à dire, c'est tellement beau que c'est à vous dégoûter de pas être mort !
@ vagabonde : hum... et encore je n'avais pas encore terminé le livre de Jean-Paul Chabrier...
L'autre jour, par hasard, à la télé, j'ai vu la tête minuscule d'un bébé kangourou déborder de la poche de sa maman, et il roulait ses petits yeux curieux tout autour de lui. Celui-là, bien sûr, il va "aimer la vie"...