Où est le doux temps où il fallait pousser un peu la queue touffue du chat pour continuer à écrire sa ligne sur le gros cahier ? où il fallait ramasser les crayons entre lesquels son corps avait voulu se faire un nid ?
Maintenant l'écrivain devant son ordinateur attriste le chat. Nora (oui, c'est une chatte) - monte délicatement ses deux pattes avant sur ma cuisse - implorante. J'ai beau lui dire que je travaille, que je veux être tranquille, elle revient, plus douce encore, et fait mine de vouloir être brossée, en lissant le sol du bout des pattes, obstinée.
Alors je quitte ma machine, vais chercher ses brosses, la dure et la douce, et Nora s'étale, heureuse, ronronnant tandis que je la brosse, des joues au ventre, du front à la queue, encore et encore jusque sous le menton, par petites touches - je fais comme si c'était la langue râpeuse de sa mère perdue qui la nettoyait. Ensuite je la caresse, je lui parle.
Mais le moteur de mon ordinateur émet un grondement sourd, réprobateur. Lui aussi réclame mes mains, ma présence.