le blog de Lika Spitzer

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Peut mieux faire (extraits)

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Pour Corto : Vareuse

Vareuse... Un joli mot très français. Mais j'ai l'impression qu'il faut avoir fait son service militaire dans la Marine nationale pour avoir idée d'employer ce mot-là, ou bien avoir eu un père, un oncle, un grand-père dans la Marine; et de plus, avoir un certain âge, parce que les jeunes n'emploient pas les mots que leurs copains n'emploieraient pas.

Pour moi, c'est trop tard de toute façon. Même si je possédais un ami qui l'emploie, je ne saurais prononcer ce mot avec naturel. Tu n'as pas vu ma vareuse ? demanderait-il par exemple. Ta vareuse..., dirais-je très provisoirement et secrètement gênée, j'ai posé ça sur le dossier du fauteuil.

Vareuse... Il me rappelle courtoisement, ce mot, que la langue française ne m'a été que prêtée et qu'elle garde, pour les siens véritables, des vocables tendres qu'elle ne saurait mettre sur des lèvres étrangères sans se contraindre. Vareuse... ? Décidément ce mot n'est pas pour moi.

La chose refusée

Je crois que la chose qui m'a été refusée, LA chose par excellence, a été la lucidité.

En effet, il n'est pas d'année, de mois même, où je ne découvre quelque illusion majeure benoîtement plantée dans ma vie comme un mât oublié dans le brouillard et à quoi je me cogne et me blesse. Les voiles pourtant ont disparu depuis longtemps et l'océan aussi, avec tous ses poissons. Mais il m'arrive encore de heurter dans le brouillard un coin de coque, un mât, une ancre et maintes bizarreries dont je fais des textes - comme d'autres dans leurs jardins font des chemins avec les galets qui ont attiré leur attention sur la plage. LES BAIGNADES SONT INTERDITES, indique l'unique poteau, et rien d’autre. Alors étendant ma lessive sur les fils comme je l'ai vu faire autrefois à notre bonne, je rêve aux grandes voiles anciennes, sans bien comprendre où j'ai échoué.

La chose qui m'a été refusée, LA chose par excellence, a été la lucidité.

Une bonne élève

Je rêvais - sans rêves politiques. Et voilà que cela déplaisait à mon professeur de philosophie, dont les rêves étaient traversés des problèmes de beaucoup de pays et de la nécessité de faire la révolution dans le nôtre.

Il parla, parla longtemps, et voici qu'enfin des indignations socialistes apparurent dans mes rêves, qui me faisaient m'agiter dans mon lit, parler tout haut et transpirer autant qu'un docker syndiqué. Fierté.

Electronique égale panique

France Musique, France-Culture, ondes ceci, ondes cela, je ne comprends pas du tout comment ça se goupille et encore moins comment se goupille ma lâcheté persistante devant les machines. Un enfant de six ans est plus expert que moi en manipulations pour parvenir à sélectionner ce qu'il veut. Moi, dès qu'il est question d'électronique c'est la panique. Quel âge mental ai-je donc ? six mois ? dix mois ? Car je bave à la table de la modernité, curieuse de tous ces objets à arêtes dures trop lourds ou trop gros pour que je puisse les porter à la bouche, mais si quelqu'un veut se mêler de m’en expliquer le fonctionnement je hurle

Dire, "mon mari"

A l'adolescence je trouvais épatant et un peu horrible le mot mon mari, et surtout d'avoir le droit de le prononcer - une certaine assiduité dans le comportement privé rendant ce possessif apparemment admissible.

Pour moi le mariage représentait une incongruité de la vie ordinaire : ses lois bafouées partout et pourtant, comme beaucoup d'objets très laids, d'une solidité à toute épreuve. Or, voilà que je puis dire, «mon mari», presque naturellement.!

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