le blog de Lika Spitzer

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La Mort de Sardanapale (extraits)

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Histoire du diable

Cependant le diable était inquiet de l'air frais, du chant perdu d'un oiseau : d'une inconnue jouant à la marelle. Il courut chercher des pierres et s'emmura parmi les coquelicots.

- Ne la regarde pas, c'est la maison du diable.

- Mais je veux, dit l'inconnue, aller dans la maison du diable.

- C'est toi, dit le diable.

Il était étendu sur son lit, à bout de forces. Il avait sur sa table un petit bouquet de coquelicots.

- Pourquoi n'es-tu pas dans le jardin, dit l'inconnue. Ici c'est la maison du diable.

Le diable lui répondit :

- J'ai peur des coquelicots et des coteaux, j'ai peur de l'air et du clair, j'ai peur du soleil solitaire dans l'air. J'ai besoin de murs. Même j'ai peur de toi, avec ta pierre. Regarde ce que je fais.

Et il avala d'un trait l'essence de térébenthine et fit l'avaleur de feu - puis s'étendit dans d'atroces souffrances.

- C'est beau, dit l'inconnue. Je m'appelle Li.

- Je ne t'ai rien demandé, dit le diable. Et il se tourna contre le mur.

Mais comme elle demeurait là à le regarder, les pierres montèrent entre eux, autour d'eux, ils furent submergés.


- Qu'as-tu fait de ta fiancée, demanda le diable au diable.

- Son palet de marelle à la main je l'ai emmurée, cimentée à moi : son âme sur mon dos plus liée à mon âme que l'enfant à sa mère chinoise. Je l'ai envoyée au diable.

 

 

 

Dire je t'aime

J'ai besoin de dire je t'aime. Alors je vais dire je t'aime à Fran qui hantait L'homme au crâne rasé. Je t'aime à Ira que vous ne pouvez pas connaître, et à d'autres. Je t'aime.
Je t'aime à monsieur Montel qui avait perdu ses dents, sa voix, et sa jeunesse d'un seul coup, à son frère Kostoglotov, à Tchékhov - mais tout bas - à Michel, traître cent fois, Robin dix fois et s'en va... à mes livres, à mon chat. Je vous aime.

Je leur offre à boire en pensée ; mon lit s'ils veulent, encore que je n'insiste pas. Je leur offre mes cigares, bien qu'ils ne fument pas ni moi - je leur dis je vous aime.

 

 

Tout écho refusé

Laisse-moi glisser, m'en aller. Dis-moi : tu n'es pas intéressante, je n'ai pas de temps à. Ne me retiens pas, liée à tes yeux nez bouche cheveux (splendeur Sérieuse de ton visage clos au sol retenu par quelque refus ou vouloir secret ou rire intérieur - cassé)
Pourquoi dois-je te suivre toujours à petits pas brouillés tandis que, interminablement, tu vas de trottoir en trottoir sous la pluie et la nuit longer arpenter frapper - tout écho refusé - ces parois condamnées.


Pour Michèle : Chanson des plumes

- Qui laisse, dit Frère, traîner ces plumes par terre. On marche dessus, c'est agaçant.

- C'est moi, dis-je, c'est moi. Et je me presse de les rassembler pour en faire un chapeau, un beau chapeau fou.

- Qui laisse, dit Frère, traîner cet horrible chapeau à plumes.

- C'est encore moi, dis-je, et je fabrique une poupée pour le chapeau à plumes, grande et grave, avec une robe en taffetas violet.

- Qui laisse, dit Frère, traîner cette vieille poupée déplumée.

- C'est moi, dis-je. Est-ce qu'il faut la jeter ?

- Non, dit Frère. Il faut me la donner.

 

La Mort de Sardanapale - couverture & quatrième de couverture

Le livre est actuellement épuisé, il semble.
L'année dernière, Blaise Rosnay - fils du poète Jean-Pierre Rosnay et éditeur de mes ouvrages - a réussi à en retrouver une dizaine au Club des Poètes qu'il dirige maintenant.














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